Il y a des silences qui en disent long, des regards baissés qui traduisent l’émotion contenue, et des sourires discrets qui trahissent un bonheur simple, mais profond. Victor Dubuisson, 35 ans, a vécu tout cela, en l’espace de trois jours, sur les fairways ondulés et les greens piégeux du Golf de Biarritz Le Phare. En remportant, ce dimanche, la 126e édition de la Biarritz Cup by C&S Partners au terme d’un sublime playoff contre l’Espagnol Jorge Maicas, l’Azuréen n’a pas seulement retrouvé le chemin de la victoire. Il a surtout retrouvé son golf, celui qu’on lui connaissait avant les blessures, le recul, et la distance prise avec le très haut niveau. Dans un tournoi qui, pour la première fois de son histoire centenaire, était co-sanctionné par l’Alps Tour, Dubuisson a su dompter un parcours aussi court que technique – un par 70 de 5 402 mètres – qui ne laisse aucune place à l’approximation, surtout lorsque la brise marine s’invite dans la partie. Avec une carte finale de -19 (61-65-62), ponctuée par une victoire au deuxième trou de play-off grâce à un birdie chirurgical, l’ancien héros de Gleneagles 2014 a rappelé à tous que le toucher ne se perd pas. Même après le silence.
Une victoire aussi personnelle que symbolique
Tout au long de la semaine, Dubuisson a su poser la balle où il fallait, souvent au mètre près, exploitant à merveille la lenteur trompeuse des greens et les pentes traîtresses du Phare. Dès le premier tour, le ton était donné : une carte de 62 sans bogey, avec un finish somptueux (birdie au 18 après un coup de wedge parfaitement dosé). Il partage alors la tête avec l’amateur Rudy Sautron, lui aussi auteur d’un 62 brillant, conclu par un eagle au 18.
Dubuisson confiera plus tard n’avoir accepté l’invitation au tournoi que pour accompagner Gérald, son ami et sponsor du tournoi, qui l’a caddeyé tout au long de la semaine.
“Je ne suis pas venu pour me prouver quoi que ce soit, mais pour vivre un beau moment avec lui. Gérald soutient de jeunes pros, et il voulait vivre un tournoi de l’intérieur. Je ne pensais pas que ça irait aussi loin. C’est une belle surprise”, expliquait-il dimanche après-midi, visiblement touché.
Et pourtant, tout au long du tournoi, il n’a rien laissé au hasard.
Lors du deuxième tour, malgré une entame un peu plus calme, il s’accroche pour signer un solide 65 (-4), se maintenant à -11 total, à la quatrième place, à quatre coups du leader irlandais Ronan Mullarney.
📸 Crédit photo : Pierre Chabot / Alps Tour Golf
Le dimanche, alors que la pression monte pour les jeunes du circuit à la veille de l’échéance de la Qualifying School, Dubuisson déploie un jeu aussi simple qu’efficace. Neuf birdies sur sa carte (1, 5, 6, 8, 11, 12, 14, 15, 18), pour un seul bogey au 13. Résultat : un 61 étincelant, et un total de -19 partagé avec Maicas, auteur d’un 60 impressionnant.
Le play-off, disputé en fin d’après-midi devant un public médusé, a tenu toutes ses promesses. Par au premier trou pour les deux joueurs, puis birdie pour Dubuisson au second, après une mise en jeu parfaite et un putt sans trembler. Du grand art.
Le prestige retrouvé d’un tournoi centenaire
La Biarritz Cup 2025 n’était pas une édition comme les autres. Fondée en 1899 par Stewart Clark, elle a vu passer les plus grands noms du golf européen amateur : José María Olazábal, Álvaro Quirós, Jorge Campillo ou encore Mike Lorenzo-Vera.
En devenant cette année un tournoi du calendrier officiel de l’Alps Tour, elle a franchi un cap décisif, mêlant 60 pros à 60 amateurs triés sur le volet – dont 12 femmes dans une compétition séparée.
La présence de tous les membres du Top 10 de l’Ordre du Mérite, mené par l’Espagnol Javier Barcos, a garanti un plateau exceptionnel.
Dubuisson, évidemment, faisait figure d’ovni dans le champ, lui, ancien du Top 20 mondial, finaliste du WGC-Match Play 2014 et double vainqueur sur le DP World Tour. Mais au-delà du nom, c’est la qualité du jeu et le comportement exemplaire du Français qui ont marqué les esprits.
En refusant même le chèque du vainqueur (7 600 € redistribués à Jorge Maicas), il a envoyé un message fort à la jeune génération.
“Je suis là pour jouer, pas pour gagner de l’argent. Cette victoire, c’est une parenthèse. Et une transmission.”
Sur le plan sportif, la Biarritz Cup 2025 s’est jouée dans un climat électrique, tant l’enjeu pour les membres de l’Alps Tour est crucial. Avec seulement quelques étapes restantes avant la Grand Final, chaque point compte pour viser le Top 5 du classement final, synonyme de montée sur le HotelPlanner Tour en 2026. Et avec en plus des exemptions en jeu pour le Stage 1 des cartes du DP World Tour, le tournoi avait tout d’un révélateur.
Une jeunesse qui frappe fort, une légende qui rassure
Si Dubuisson a attiré les regards, la jeunesse française a aussi brillé.
Quentin Debove, cinquième au classement de l’Ordre du Mérite avant la semaine, a livré une prestation de haut vol, terminant quatrième à -16, après notamment une carte de 60 samedi, égalant le record officieux du parcours. Rudy Sautron, 19 ans, amateur et étudiant à Nebraska, a également tenu son rang, avec deux cartes de 62 consécutives en ouverture, concluant à -14. Gregoire Hoyeau, quant à lui, a inscrit son nom dans la légende locale avec un trou-en-un magistral sur le par 3 du 7, fer 6 en main.
📸 Crédit photo : Pierre Chabot / Alps Tour Golf
Le tournoi a ainsi vu s’entrelacer les trajectoires prometteuses et les parcours de reconquête. Comme celui de Benjamin Kedochim, enfant du pays, lauréat de l’Ordre du Mérite en 2024, ou encore celui d’Andrea Romano, l’Italien qui jouait ici pour une potentielle troisième victoire en saison, synonyme de promotion directe sur le HotelPlanner Tour.
Et puis il y a ce lieu, ce Golf de Biarritz Le Phare, joyau du golf français, taillé pour les esthètes et les stratèges. Construit en 1888, à quelques minutes de la Grande Plage et de l’agitation de Biarritz, ce parcours court mais piégeux a su, une fois de plus, révéler les plus fins techniciens. Fairways étroits, bunkers redoutablement bien placés, greens ondulants et brise constante : ici, chaque coup se mérite.
Un coup de chapeau final
Le retour de Victor Dubuisson sur le devant de la scène ne sera peut-être qu’éphémère. Il ne signera pas une saison complète sur le DP World Tour, n’ira pas courir les tournois aux quatre coins du monde. Mais qu’importe. Ce qu’il a offert cette semaine à Biarritz, c’est un moment rare, un fragment de passion retrouvée, une parenthèse enchantée dans un monde du sport où tout va trop vite. Il a rappelé que le golf, c’est aussi le droit d’écrire sa propre histoire, à son rythme.
Et si cette victoire à la Biarritz Cup n’est pas un retour au sommet, elle est au moins un retour à soi. Pour lui. Pour nous.
📸 Crédit photo : Alps Tour / Pierre Chabot
📍 Golf de Biarritz Le Phare, France
📆 25–27 juillet 2025
🏆 Vainqueur : Victor Dubuisson (-19, victoire en playoff au 2e trou face à Jorge Maicas)
⛳ Parcours : Par 70 – 5 402 mètres – Vent côtier et greens ondulés
💰 Dotation : 47 500 € (professionnels uniquement)
🎁 Le vainqueur a renoncé à son prix, redistribué à Maicas (7 600 €)
🔜 Prochain rendez-vous : Longwy Alps Open, 4–6 septembre 2025
Rédaction : MyGolfMedia.com | Contact : redaction@mygolfmedia.com
Sources : Alps Tour, European Tour, C&S Partners, Golf Club de Biarritz Le Phare
Cet article est ouvert à tous en remerciement du geste élégant de Victor Dubuisson.
